
Je ne me suis pas trompée, c’est bien dans le département du Var, et non celui de la Drôme, que je t’entraîne aujourd’hui ! Une petite infidélité…
Une fois n’est pas coutume, La Montilienne fait un pied de nez à sa ligne éditoriale en osant sortir de la Drôme !
Rien ne va plus !
Je vais te parler de l’exposition « La table, un art français. Du XVIIe siècle à nos jours » qui se trouve jusqu’au 6 mars au HDE du Var à Draguignan, ancien siège de la préfecture varoise.
Mes 5 bonnes raisons
La cause principale à cet écart est sentimentale, puisque tu pourras remarquer que l’un des 2 commissaires de cette exposition est ma maman. Mais outre cette valeur affective indéniable, j’ai accepté de mettre en valeur cette exposition pour 5 bonnes raisons :
- Je la trouve particulièrement réussie, d’une grande qualité, d’une magnifique muséographie esthétique et raffinée.
- Le sujet des arts de la table me passionne. Eh oui ! J’ai grandi à Limoges, littéralement dans un musée de porcelaine. Ce sujet est donc une madeleine de Proust pour moi !
- L’Hôtel des Expositions du département du Var (HDE), qui accueille cette exposition, est tout neuf. Il m’a impressionnée par sa singularité et ses volumes.
- Draguignan, ce n’est pas si loin et c’est une belle région aussi ; de nombreux Drômois s’y rendent régulièrement en villégiature.
- Tu as dit « oui » à la rédaction de cet article ! Effectivement, il y a quelques jours, j’ai organisé un sondage sur les réseaux sociaux, demandant si un tel sujet était pertinent. 80% des sondés ont dit « oui » !
Alors je me lance !
J’ai très envie de te parler un peu du sujet des arts de la table, tu vas voir il y a des détails fascinants ! Je suis sûre que tu vas apprendre des choses ! Je vais également te présenter le tout nouveau lieu d’exposition, le HDE Var, et son projet ambitieux et audacieux.
Et puis évidemment, je vais t’expliquer comment profiter des 3 dernières petites semaines d’exposition !
I La table, un art français.
Bah oui, soyons chauvins, mais en ce qui concerne les arts de la table, invention typiquement française, il y a vraiment de quoi s’enorgueillir ! Cette magnifique et riche exposition le confirme !
Je trouve passionnant le sujet des arts de la table car cela parle de l’évolution de notre société et de ses mœurs. C’est éminemment sociologique !
Dans ce domaine, une vraie révolution prend place à partir du XVIIe siècle, qui va bouleverser et transformer en profondeur les arts de la table, et ce jusqu’à aujourd’hui ! Mais c’est aussi un sujet nostalgique, mélancolique … Car si les arts de la table ont beaucoup muté, l’évolution actuelle les ont quand même réduits à ce qu’on pourrait qualifier de peau de chagrin…
Sociologique : évolution humaine

L’histoire de la table est intimement liée aux idées de patrie, d’hospitalité, de sociabilité et de douce intimité. La table est, dans la vie, le trait d’union par excellence. Elle est en quelque sorte le refuge, le port béni où l’on vient, dans l’abandon d’une conversation aimable, se délasser des fatigues du dehors. Elle est l’autel où journellement on sacrifie aux joies pures de la famille et de l’amitié. Elle constitue enfin le lieu le plus sûr pour retenir autour d’un même foyer, ceux que leurs intérêts ou leurs convenances tendraient à entrainer au dehors.
H. Havard, historien d’art.
Cette exposition démontre bien que les arts de la table ne sont qu’une manifestation concrète de ce qu’est l’humanité. Eh oui, toute espèce a besoin de se nourrir, c’est une question de survie, mais l’Homme, espèce douée de conscience, a entouré cet acte instinctif et primaire, d’un cérémonial culturel qui est devenu un véritable art : L’ART DE LA TABLE !
C’est quand même fort, non ?
C’est d’ailleurs ce message que veut faire passer cette exposition : les arts de la table comme un marqueur de l’évolution de notre société, j’oserais même le dire : de notre humanité.
Les aspects sociologique, philosophique et psychologique qu’il y a autour de l’art de la table sont fascinants ! C’est autour de la table que se nouent et se dénouent les événements heureux, malheureux, que s’installent la convivialité et la communication, que se dessinent des affaires privées comme professionnelles. Et cela depuis la nuit des temps. Mais en ce qui concerne les arts de la table français, qui seront et sont un modèle pour le monde entier, une véritable révolution apparait au XVIIe siècle.
Une révolution s’opère
À partir de la Renaissance
Alors, à ton avis : quelle est la révolution majeure qu’apporte l’époque de la Renaissance dans les arts de la table et lui fait prendre un tournant décisif ?
Si tu te rappelles de tes cours d’histoire, la Renaissance met l’homme au centre du groupe ; celui-ci prend conscience de son individualité ! Et concrètement cela se matérialise dans les arts de la table : L’Homme n’a plus envie de partager sa gamelle, sa coupe… Petit à petit apparait donc :
- Des couverts, une serviette, de la vaisselle, un verre personnel,
- Des règles de savoir-vivre qui viennent normer ces nouveaux principes,
- Des pièces réservées aux repas : des salles à manger.
6 anecdotes captivantes. Le savais-tu ?
- Les heures des réjouissances ont beaucoup changé au fil du temps mais le nombre a toujours tourné autour de 3 voire 4 repas.
- C’est le philosophe Érasme qui, en 1530, a édicté bon nombre des règles de savoir-vivre dans son livre La civilité morale des enfants. La propreté, la politesse, la civilité, la décence et la bienséance devinrent les maîtres-mots du savoir-vivre. Ces règles de maintien à table furent reprises par tous les manuels de savoir-vivre et demeurèrent pour la plupart immuables : comme la règle de ne pas mettre ses coudes sur la table !
- À partir de 1810, le « service à la française » où tous les plats étaient présents sur la table, est devenu « service à la russe » au cours duquel les plats étaient présentés aux convives successivement. Aujourd’hui notre service est dit « service à l’assiette » puisque l’on nous propose généralement une assiette déjà remplie.
- La « salle à manger » en tant que pièce dédiée, n’apparaît que vers 1770. Avant, on dressait des tréteaux au gré des heures et des occasions.
- Le « petit-déjeuner » n’apparaît que tardivement, au début du XIXe siècle.
- La Révolution française envoie les cuisiniers personnels des aristocrates à la rue. Ils s’établissent à leur compte et ouvrent des restaurants qui extériorisent ce qui se passait alors dans l’intimité !

Avec l’apparition des restaurants
Pierre Provoyeur, co-commissaire de l’exposition écrit : « l’art de la table est entré avec le restaurant dans l’âge démocratique, c’est par le biais de la gastronomie qu’elle retrouve maintenant le statut d’un art vivant. »
À ce propos, savais-tu que le « repas gastronomique des Français » est au patrimoine de distinction de l’UNESCO ?!
La constatation est claire, les arts de la table ont sérieusement muté, d’aucuns diront que l’avènement des restaurant les ont tués. Ce qui est à nuancer, car les arts de la table ont tout naturellement suivi les évolutions de la société contemporaine qui tend à une simplification des us et coutumes, même si, dixit maman, l’apparition de la restauration rapide et des repas pris sur le pouce, menacent sensiblement un art spécifiquement français.
Alors, il est vrai aussi que cette exposition revêt un caractère un brin nostalgique…
Un sujet nostalgique
Mais oui, c’est aussi une douce mélancolie qui émane de la visite de cette exposition car on s’aperçoit que l’art de la table c’était en grande partie une profusion d’ustensiles en étain, en cuivre, en céramique, dont chacun avait un sens bien précis. Si l’apogée de ces objets a pris place au XVIIIe siècle, aujourd’hui, s’ils ne sont pas tombés dans l’oubli, ils ont trouvé leur place dans des brocantes, chez des antiquaires ou au mieux, dans des musées.
Sais-tu ce qu’est :
- un pot à oille
- une melonnière
- un œufrier
- un rafraichissoir
- un dressoir…?
Cela appartient maintenant aux designers qui se plaisent à créer des objets d’art avec la matière de ce que furent les ustensiles de la vie courante. À partir de 1950, les arts de la table devinrent un lieu de création artistique.

Ce constat est a nuancer, car de cette époque fastueuse, bon nombre d’objets sont entrés dans notre quotidien comme :
- La fourchette
- Le beurrier
- Les couverts de service
- Le coquetier
- La sucrière
Te rappelles-tu que dans un temps pas si lointain, existaient encore des magasins spécialisés dans les arts de la table ? La rue Paradis à Paris y était consacrée… Maintenant, tout cela est relégué dans quelques rayons de galeries de luxe telles que les Galeries Lafayette ou Le Bon Marché …

II HDE Var
Le HDE Var offre un magnifique écrin à cette exposition. J’ai d’ailleurs trouvé très intéressant qu’une exposition de cette envergure se trouve en province.
Il faut dire que Draguignan, ancienne préfecture du Var, s’est récemment dotée d’un superbe lieu d’exposition.
L’Hôtel des Expositions du Var (HDE), révèle une ambition audacieuse, qui est à souligner !
Ce nouvel équipement a pour but d’être un lieu culturel unique dédié à l’histoire et aux civilisations. Il permet d'étendre l’offre culturelle du département partout
sur son territoire.
C’est également un investissement destiné à faire connaître le Var et la qualité des expositions qu’il conçoit au-delà de ses frontières. En y organisant des événements culturels majeurs, des expositions de qualité, le département affiche sa volonté d’y attirer un public régional, national et même international.

III Comment profiter des 3 dernières semaines d’exposition
Parlons vrai, parlons bien ! Il ne reste que 3 petites semaines pour visiter cette magnifique exposition ! Tu y trouveras une grande diversité d’objets, de matériaux, de représentations iconographiques et d’œuvres d’art. Il y a près de 500 œuvres, réparties sur 3 étages, provenant en majorité des riches collections, de divers musées de Beaux-Arts et d’Arts Décoratifs pour ne citer qu’eux, ou encore de collections particulières.
C’est ainsi que se côtoient aussi bien des objets du quotidien, des produits
issus de manufactures célèbres à l’image de Christofle, Sèvres, Limoges... et des objets créés par des artistes contemporains comme Jean Dufy, Jean Luce, René
Lalique, Louis Sue et André Mare, Arman, Anne et Patrick Poirier...



Et comme ce sont les vacances scolaires, je me suis dit que tu pourrais profiter de ce temps pour faire un saut dans le Var ! Ce n’est pas si loin, la jolie ville de Draguignan est au beau milieu d’un territoire culturellement très riche… À 20 minutes de la mer, pas si loin des stations de ski, non loin de Fréjus, Saint-Raphaël, Cannes, Saint-Tropez, Hyères, Nice, Toulon, Marseille…
Vite, « La table, un art français » se termine le 6 mars 2022. D’ici là tu peux y aller du mardi au dimanche de 10h à 19h. Le tarif normal est de 5€. C’est une exposition ludique dans sa mise en scène, elle peut très bien convenir aux enfants. Toutes les informations pratiques sont à retrouver ici.
Je sais avec certitude que cette exposition saura satisfaire, les curieux, les amateurs d’histoire de la gastronomie, les personnes sensibles à l’esthétisme, à un certain sens du beau, de la finesse, du raffinement, du savoir-vivre, de la délicatesse…
Si c’est ton cas, ne perd pas une occasion d’aller à Draguignan avant le démontage de cette exposition, tu louperais vraiment une belle expérience !
Les vacances scolaires, en Drôme, sont le moment idéal pour s’offrir une petite escapade varoise.
Qu’en dis-tu ?
Et si tu y vas, cela me ferait très plaisir que tu indiques venir de ma part. Je ne pense pas que cela sera un sésame (!), mais cela me permettra de mesurer l’impact que pourrait avoir cet article !
Et voilà, un article sur un sujet hors de Drôme, attention je risque d’y prendre goût !
La Montilienne
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